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Auteur/autrice : Ewen Le Barch

Crédit immobilier : les taux fixes à la française sont-ils sauvés ?

Taux fixe, caution et crédit accordé selon le taux d’endettement : ce triptyque, constitutif du prêt immobilier « à la française », a été menacé par le comité de Bâle (1). Une menace qui s’est éloignée en ce début janvier. Définitivement ? Entretien avec Michel Mouillart, professeur d’économie à l’Université Paris Ouest et membre de l’observatoire Crédit Logement-CSA.

Quelle est la particularité du « modèle français » de crédit immobilier ?

Michel Mouillart : « Je parlerai plus globalement des spécificités du modèle français du financement du logement, car il présente des caractéristiques que l’on ne retrouve pas ailleurs. C’est ce qui a permis à la France de résister à la crise des années 2007-2009, et d’éviter que les ménages ne se retrouvent massivement en situation d’insolvabilité avec des biens immobiliers bradés par les établissements de crédit. C’est aussi ce qui permet aux ménages remboursant un crédit de ne pas subir les fluctuations des taux d’intérêt sur les marchés, et ce qui explique que les défauts de remboursement sont à un niveau très bas en France. »

« Un modèle sécurisant-sécurisé, permettant de surmonter des crises majeures »

Quelles sont donc ces spécificités ?

M.M. : « Premièrement : une production très largement dominée par les taux fixes. Même quand les taux variables étaient plus courants, dans les années 2000, ils étaient presque toujours capés. Nous sommes donc clairement sur un modèle à taux fixe. Deuxièmement : un modèle qui apprécie la qualité de l’emprunteur à la lumière de sa capacité de remboursement, et non pas en fonction de la valeur du bien immobilier financé. Troisièmement : la caution. Cette garantie permet la plupart du temps de résoudre le sinistre en cours d’émergence chez l’emprunteur (maladie, chômage, séparation, etc.), ce qui évite la réalisation du gage, c’est-à-dire la vente du bien par l’établissement de crédit. Ainsi, le modèle français de financement du logement est un modèle  »sécurisant-sécurisé », permettant aux emprunteurs et aux banques de surmonter des crises majeures. »

Pourquoi un modèle si sécurisant a-t-il été remis en cause ?

M.M. : « Ce modèle peut être délicat à comprendre pour des banquiers anglo-saxons, étrangers à l’idée de caution de prêt bancaire. Ils ont une certitude : celle de la nécessité d’introduire une variabilité de taux. Leur modèle garantit en priorité le prêteur, le risque potentiel étant reporté sur le ménage. Une grande partie des banquiers représentés au comité de Bâle a ce modèle anglo-saxon en référence. Et, voici plus de 2 ans, le comité de Bâle estimait que le risque de taux n’était pas bien ou pas suffisamment pris en compte en France. »

Au fil des discussions, le comité de Bâle a fait évoluer sa position…

« Un séisme comparable à celui provoqué par la crise des subprimes en France ! »

M.M. : « Les propositions émises en décembre 2014 ont suscité de vives réactions. Puis les grandes inquiétudes se sont progressivement dissipées. Ensuite, une nouvelle question a surgi, celle relative au risque de crédit. Le comité de Bâle a considéré qu’il y avait nécessité de réviser les pondérations standards, en gommant les spécificités des modèles nationaux. Cette remise en cause allait donc au-delà des réflexions sur les taux et les durées ! Il aurait fallu, dans l’optique du Comité de Bâle, abandonner une autre spécificité du modèle français, celle du taux d’effort qui mesure la solvabilité de l’emprunteur. La référence au taux d’effort aurait alors été remplacée par la prise en compte du ratio LTV [loan to value, qui mesure le rapport entre les crédits mobilisés pour financer l’acquisition et la valeur du bien sur le marché, NDLR]. Cela faisait peser un véritable risque sur l’activité immobilière, et a incité les autorités françaises et tous les acteurs concernés à reprendre leur travail de lobbying, dès le printemps 2016. Car cela aurait eu pour conséquence de doubler – voire plus que doubler – les fonds propres nécessaires pour prêter à des ménages modestes primo-accédants dont l’apport personnel est très faible et qui, pourtant, ne présentent guère de risque de défaut. Cela aurait engendré une perte de 30.000 opérations dans le neuf et 150.000 opérations dans l’ancien [par an]. Un séisme comparable à celui provoqué par la crise des subprimes en France ! »

Lire aussi l’interview de Daniel Goldberg : Faut-il sauver le modèle français ?

Comment interpréter les récentes déclarations du gouverneur de la Banque de France, et le report de la réforme des accords de Bâle 3 ?

« Aucun risque n’est jamais écarté »

M.M. : « Le comité a reporté sine die son projet. Car le travail de lobbying a porté ses fruits, et parce qu’il y a eu une véritable prise de conscience au niveau européen, notamment, des effets dévastateurs des propositions concernant le risque de crédit. Mais attention, aucun risque n’est jamais écarté, même s’il y a eu un consensus autour de la nécessité de ne pas avancer dans la voie proposée par le comité de Bâle. »

Concrètement, cela signifie que la menace est écartée sur les modalités d’octroi, basées sur le taux d’endettement. Et les menaces sur les taux fixes ?

M.M. : « D’après ce que l’on en sait, il y a eu une volonté largement partagée de rejeter les propositions du comité de Bâle sur ce risque de crédit. Quant aux propositions qui avaient été faites concernant le risque de taux, peu d’inquiétudes demeurent sur l’impact qu’elles devraient avoir sur le modèle français de financement du logement. »

« Il y a eu une volonté largement partagée de rejeter les propositions du comité de Bâle sur ce risque de crédit »

Il a pourtant subsisté un flou…

M.M. : « Le flou vient du fait que tout n’est pas toujours très clairement présenté et analysé lorsqu’il s’agit de réformes potentielles portées par le comité de Bâle. La transparence n’est guère de mise en la matière. Mais c’est un autre problème. »

Le Haut Conseil de stabilité financière (HCSF) a demandé à maintes reprises aux banques de se montrer vigilantes dans leur politique de taux fixes. Une correction est-elle nécessaire ?

M.M. : « Je vais me permettre de citer le rapport de l’ACPR sur le financement de l’habitat en 2015 (2) :  »Après avoir progressé entre 2011 et 2014, le montant du coût du risque sur les crédits à l’habitat a enregistré un repli de 15,2% en 2015 (…). Rapporté à l’encours moyen des prêts concernés, il s’établit ainsi à 0,063% (…) et se maintient à un niveau nettement inférieur au coût du risque global des six principaux groupes bancaires français. » Je peux comprendre que l’on soit vigilant, mais il faut veiller à ne pas crier au loup : tous les ans, dans ce même rapport, l’ACPR avait par exemple rappelé le risque d’effondrement des prix de l’immobilier, qui devait conduire les établissements de crédit à une très grande prudence en la matière. C’est son rôle… Soit. Par ailleurs, je rappelle que la Banque de France publie des précisions macroéconomiques : elle prévoit une remontée des taux de l’OAT qui conduirait à 1% sur l’ensemble de l’année 2017. Ce qui si NDLR]. Et je rappelle que ces mêmes prévisions tablent sur le maintien à 0% des taux de refinancement de la BCE au moins jusqu’à l’automne 2018. Il ne semble pas qu’il y ait péril en la demeure. »

« Je peux entendre que les taux sont bas… Mais heureusement ! »

« On peut néanmoins évoquer des risques potentiels mais encore faut-il proposer des solutions alternatives. Nous avons un important besoin de logement en France : comment va-t-on le couvrir ? Si on ne le fait pas par recours au crédit, il faudrait que l’Etat subventionne directement ou indirectement la construction locative sociale, par exemple. Or j’ai cru comprendre que le gouverneur de la Banque de France souhaitait que l’Etat soit plus économe… Il faut donc prendre un risque : autant prendre un risque de faible ampleur, ce qui est le cas pour le crédit immobilier aux ménages. Je peux entendre que les taux sont bas… Mais heureusement ! Car il n’y a plus beaucoup de soutien public à la demande des ménages. »

Concernant la probable remontée des taux en 2017…

« En 2017, les taux immobiliers n’iront pas au-delà de 1,75% »

M.M. : « Compte tenu des évolutions des taux des crédits immobiliers depuis le début de l’année, je vous confirme mes prévisions de novembre dernier : en 2017, les taux immobiliers n’iront pas au-delà de 1,75%. Et ils pourraient même très probablement plafonner à 1,65% (3). »

(1) Comité rassemblant les gouverneurs de banque centrale d’une trentaine de pays.

(2) Analyses et synthèses, juillet 2016, Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR).

(3) Selon la dernière étude mensuelle de l’observatoire Crédit Logement-CSA, le taux moyen était de 1,34% en décembre 2016.

Eternelle question pour tout propriétaire en quête d’une nouvelle résidence principale : faut-il vendre puis acheter, ou plutôt acheter avant de vendre

Eternelle question pour tout propriétaire en quête d’une nouvelle résidence principale : faut-il vendre puis acheter, ou plutôt acheter avant de vendre ? Facile : dans l’idéal, il faut faire les deux au même moment. Sauf que ce n’est pas toujours si simple…

Cas n°1 : acheter et vendre au même moment

Scénario idéal : vous identifiez le bien qui vous convient. Pendant la période de négociation, vous mettez votre logement en vente et… vous trouvez immédiatement preneur. Dans ce cas, les deux dossiers étant menés de front, faire concorder les dates d’achat, de vente, les transactions et le déménagement est envisageable. Cet alignement des planètes concerne-t-il beaucoup de monde ? Difficile à dire vue l’absence de statistiques précises sur le sujet.

Côté plan de financement, ce scénario est évidemment idéal. Le produit de la vente va vous permettre de solder le prêt en cours pour ce logement. S’il vous reste encore de l’argent après le remboursement total du crédit, il pourra aussi servir d’apport pour la nouvelle résidence principale, afin de limiter le montant du crédit contracté pour le nouveau bien. A savoir, concernant les indemnités de remboursement anticipé (IRA) de l’ancien prêt : de nombreux contrats prévoient une exonération pour la revente du bien.

Lire à ce propos : Les clauses à négocier pour les remboursements anticipés

Cas n°2 : vendre avant d’acheter

Vendre pour acheter dans la foulée, c’est évidemment possible. Mais les intéressés se mettent alors dans une situation inconfortable : « Si vous vendez et que vous ne trouvez pas un bien satisfaisant avant la vente effective, quelles sont les solutions de repli ? » Entre la signature du compromis et la réalisation de la vente chez le notaire, il faut compter généralement deux à trois mois.

En visant la vente en priorité, la solution la plus sécurisante est de négocier la date de départ avec l’acquéreur. « Encore faut-il que l’acheteur accepte. L’autre option, qui permet de prendre le temps d’acheter le bien adéquat : vendre, puis louer avant d’acheter. « Je crois que ce n’est pas si fréquent , sans toutefois disposer de statistiques sur le sujet. L’option location oblige en effet les vendeurs à réaliser deux déménagements, avec les conséquences que cela implique en termes de frais et de temps.

Côté financement, comme dans le cas précédent, ce scénario ne pose pas de grandes difficultés puisque tous les éléments sont connus. Le propriétaire sait combien la vente va lui rapporter : il connaît donc son budget pour l’achat et peut sonder une ou plusieurs banques pour élaborer le financement de l’achat s’il vise un logement plus onéreux. En revanche, en cas de location pendant la période de transition, les loyers seront « perdus » dans le sens où ils ne seront pas investis dans un bien immobilier.

Le conseil du Cabinet Place du Courtage

Le marché étant dynamique, avec des délais de vente de 3 mois, en moyenne, et des taux d’intérêt très bas, ce n’est pas prendre un gros risque que d’acheter avant de vendre. C’est l’option que nous conseillons, rien que pour avoir le temps de choisir sa nouvelle résidence principale. »

Cas n°3 : utiliser un prêt relais pour acheter, puis vendre

Un prêt relais, c’est une avance sur la future vente. Plusieurs types de montage financier existent mais le principe reste le même : la valeur du logement actuel est estimée, puis la banque prête à court terme (souvent 2 ans) l’équivalent de 50% à 70% de la valeur du bien. Une somme alors considérée comme un apport pour le financement du nouvel achat. En bref, sans avoir vendu sa résidence principale, l’acheteur souscrit deux prêts : un prêt relais pour disposer du futur apport de la vente, et un prêt immobilier classique à long terme.

L’explication de Christophe GRISET

« Avant la revente, l’emprunteur ne rembourse que les mensualités du prêt long terme complémentaire, et l’assurance pour les deux crédits. Il ne remboursera les intérêts et le capital du crédit relais qu’au moment de la revente. Il pourra alors également effectuer un remboursement anticipé partiel, sans frais, sur le prêt long terme complémentaire avec l’éventuel excédent de la revente. »

Le prêt relais engendre évidemment un coût : des intérêts et des cotisations supplémentaires d’assurance emprunteur. Et il s’agit d’un prêt à durée limitée : l’emprunteur devra faire des concessions sur le prix de vente afin de limiter la période transitoire. « Il faut avoir anticipé la vente, en faisant estimer le bien par avance », Puis le proposer à un prix réaliste. » Attention toutefois : selon la zone géographique, le délai de vente est difficile à anticiper. Le délai moyen n’est que de 81 jours en Champagne-Ardennes, en juin 2016, mais s’étale sur 109 jours en Auvergne.

Et si l’emprunteur-acheteur sait qu’une vente est envisageable à très court terme ? Le prêt relais intervient alors comme une simple soupape de sécurité. Exemple : cet emprunteur parvient finalement à vendre rapidement son ancienne résidence principale, en négociant un départ concomitant à l’achat. Bref, le scénario idéal. Quid du prêt relais ? « Il s’annule », et l’on bascule immédiatement sur le prêt classique ».

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